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Donnons aux jeunes l’envie d’industrie !

Tribune publiée dans les Echos le 22 avril 2022

Tribune d’Alexandre Saubot, Président de France Industrie et de Patrice Caine, Vice-Président de France Industrie

Après la crise sanitaire, le drame ukrainien à nos portes a pour conséquence, une fois de plus, de révéler les dépendances inquiétantes des pays européens et la fragilité de leurs chaînes d’approvisionnement. La souveraineté industrielle et énergétique est plus que jamais au centre des préoccupations et a fait une entrée en force dans le débat public.

La réindustrialisation de notre pays est une partie de la réponse. Plus d’industrie(s) engendre plus de recherche et d’innovation dans nos territoires, plus d’autonomie, moins d’impact environnemental (les « émissions importées » représentent la moitié de l’empreinte carbone française), plus de valeur ajoutée et plus d’exportations.

Si les politiques ont pris le sujet à bras-le-corps, afin de faire retrouver à la France son statut de puissance industrielle, le secteur a encore du chemin à faire pour reprendre une place dans le cœur et l’imaginaire de tous les Français, et en particulier des jeunes.

Dans l’imaginaire collectif, l’usine est encore assimilée aux fumées noires, à un travail taylorisé dévalorisé. Pourtant, les usines d’aujourd’hui n’ont plus rien à voir avec ces clichés. Elles ressemblent bien plus souvent à des lieux de haute technicité, où savoir-faire manuels et hautes technologies se complètent et se renforcent mutuellement.

Robotisation, production décarbonée, innovations tous azimuts sur les produits… L’industrie de demain ne sera pas celle d’hier. Et elle va avoir besoin de toujours plus de nouvelles compétences pour réussir ces transformations. Comment alors faire changer les mentalités et susciter de nouvelles vocations ?

Nous, industriels, avons la conviction que pour que la France redevienne une terre d’usines, il faut agir dans deux directions : promouvoir les carrières offertes par le secteur auprès de jeunes venus de tous les horizons (ruraux, urbains ou péri-urbains et particulièrement les jeunes femmes) et redonner ses lettres de noblesses à l’aventure collective qu’a toujours été l’industrie.

L’attractivité des carrières dans l’industrie devrait relever de l’évidence. Avec des salaires plus élevés que la moyenne, de meilleures possibilités d’évolutions et plus de choix en matière d’implantation géographique, le secteur ne manque pas d’atouts. Le fort rebond de l’apprentissage en 2021 (+25%) constitue un signe encourageant d’une meilleure perception de ces avantages, mais nous allons devoir aller plus loin si nous voulons être ambitieux pour la réindustrialisation du pays.

Pour y parvenir, nous aurions intérêt à nous mobiliser pour attirer davantage vers ces métiers la population féminine qui ne représente aujourd’hui que 30% des effectifs de l’industrie en France. Cette réalité est directement liée à leur sous-représentation dans les filières de formation en ingénierie. Or les exemples internationaux nous montrent qu’il ne s’agit aucunement d’une fatalité : dans les pays nordiques, les femmes représentant la majorité des ingénieurs, contre 28% en France. Elles sont aussi majoritaires dans l’industrie des semi-conducteurs en Asie par exemple. Nous sommes convaincus que des actions résolues pour attirer plus de femmes dans l’industrie, notamment grâce à la mise en avant de « role models », pourraient être bénéfique au secteur et aux enjeux d’égalité et de parité.

Plus généralement, il est urgent de faire évoluer l’image du secteur dans les imaginaires et de reprendre le fil interrompu du récit collectif que constitue l’aventure industrielle de la France.

Il faut faire comprendre à nos concitoyens ce que peut avoir d’enthousiasmant le fait de réunir des femmes et des hommes issus de tous les horizons autour d’un objectif concret : celui d’inventer et de construire.  Construire, en cherchant sans cesse à faire mieux, à développer des produits plus utiles à nos sociétés, plus performants, et plus économes en ressources.

Qu’il s’agisse d’un satellite, de semi-conducteurs, d’un nouveau modèle d’automobile verte, de yaourts ou encore de paracétamol, avoir participé à la création d’un objet industriel procure un intense sentiment de fierté collective et d’accomplissement.

En France, nous avons toutes les cartes en main pour donner un nouvel essor à l’industrie. Transmettons cet enthousiasme à la jeunesse !